Le thé en France

Savourer l’instant présent en partageant une tasse fumante servie dans une jolie porcelaine : si le thé est souvent associé à la culture anglaise, la consommation de cette boisson née il y a près de 5 000 ans en Chine est parfaitement en phase avec l’art de vivre français. Retour sur l’histoire, et la consommation actuelle, de ce breuvage ayant su se faire une place entre le café et le chocolat dans le quotidien des Français.

De l’Orient à l’Europe : le voyage millénaire du thé

C’est vers 2 700 avant J.-C. qu’un empereur chinois aurait découvert, par hasard, les vertus de cette boisson en laissant des feuilles de camélia tomber dans de l’eau chaude. Bien des siècles plus tard, en 1606 précisément, le thé arrive en Europe avec une première escale aux Pays-Bas grâce à la Compagnie néerlandaise des Indes orientales.

S’il se déploie rapidement sur le continent, il est plus particulièrement adopté par l’Angleterre lorsqu’une princesse portugaise importe la coutume du tea time en épousant le roi Charles II en 1662.

Perçu comme très raffiné, ce rituel social séduit d’abord l’aristocratie puis toute la population et, 44 ans plus tard, Thomas Twining lui dédie le tout premier salon de thé de l’histoire à Londres.

En France aussi c’est sous l’influence de la cour et des élites que le thé, toujours importé grâce au commerce maritime avec l’Asie, séduit progressivement les Français.

Notamment vanté pour ses vertus digestives, il reste néanmoins longtemps un produit de luxe avant que l’émergence des salons de thé ne le rende plus accessible au 19e siècle.
Le 1er existe d’ailleurs toujours, c’est celui ouvert en 1862 par Louis-Ernest Ladurée à Paris.

Un boulanger-pâtissier qui, lui aussi, donna son nom à une marque non pas de la fameuse boisson mais de macarons, ces petites douceurs (inventées par son petit-fils) qui s’apprécient tout particulièrement… autour d’une tasse de Mister Twining.

Pourquoi le thé parle à la culture française

Thés verts, noirs, aromatisés, tisanes, infusions bien-être… Le marché du thé en France s’adapte aux goûts et aux attentes de qualité ou de bien-être d’une population qui, si elle lui préfère encore le café, l’intègre de plus en plus dans son quotidien. En 25 ans, sa consommation aurait ainsi été multipliée par 3 et, en 2024, 66 % des foyers français en ont acheté (en vrac, en sachet ou dans des contenants réutilisables et collectionnables).
La multiplication des marques et l’essor des salons de thé démontrent d’ailleurs bien le dynamisme de cette boisson qui, atout suprême, s’inscrit parfaitement dans 2 des piliers de l’art de vivre français :

La convivialité élégante : cadres feutrés, tasses en porcelaine, douceurs sucrées en accompagnement. En France, le tea time est l’occasion de s’offrir un moment de calme dans le tumulte de la vie moderne ou, comme lors des salons littéraires du 19e siècle

où il était déjà très apprécié, de partager des réflexions en bonne compagnie.

La sensorialité. Au pays de la gastronomie, les rituels de préparation, la variété des arômes ou encore la finesse de certaines infusions invitent à des voyages gustatifs et olfactifs auxquels les Français sont historiquement sensibles.

De grandes maisons étoilées et de beaux palaces servent d’ailleurs aujourd’hui des thés réputés pour leur subtilité aromatique comme ceux de Betjeman & Barton.
L’institution anglaise, qui ouvrit la première boutique de thé parisienne en 1919, anime encore 2 adresses dans la capitale avec un concept tenant à la fois du cabinet de curiosités, de la brocante de charme et des salons feutrés anglais.

Au 23 boulevard Malesherbes dans le 8e ou au 24 boulevard des Filles du Calvaire dans le 11e, on y déniche depuis plus d’un siècle des thés d’exception et des objets de l’art de vivre autour du thé (théières excentriques, pièces vintage, accessoires délicats…). La preuve que, si le thé a longtemps symbolisé une élégance toute britannique, il trouve en France un écho naturel : celui d’un art de vivre où le goût du beau, la convivialité et la recherche du raffinement font de chaque tasse un véritable moment de culture partagée.

Valérie de Comme des Français

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